Robert F. Kennedy Jr., qui annoncera bientôt sa course à la Maison Blanche, sème le doute sur les vaccins (2023)

WASHINGTON – Robert F. Kennedy Jr. s'est tenu devant le Lincoln Memorial en janvier 2022 et a condamné la réponse du gouvernement fédéral au coronavirus en s'insurgeant contre le totalitarisme. Les Juifs de l'Allemagne nazie, a-t-il suggéré, avaient plus de liberté que les Américains face aux mandats de vaccination et aux fermetures d'écoles, d'églises et d'entreprises à l'ère de Covid-19.

"Même dans l'Allemagne d'Hitler, vous pouviez traverser les Alpes jusqu'en Suisse", a-t-il déclaré à une foule d'enthousiastes anti-vaccins brandissant des drapeaux lors d'un rassemblement "Defeat the Mandates". "Vous pourriez vous cacher dans un grenier comme l'a fait Anne Frank."

M. Kennedys'est excusé plus tard, même si c'étaitpas la première foisil avait invoqué l'Holocauste. Au cours des deux dernières décennies, alors qu'il poursuivait ce qu'il appelle «l'activisme pour des vaccins sûrs», M. Kennedy est passé d'un avocat environnemental préoccupé par l'empoisonnement au mercure à un croisé pour la liberté individuelle – une voie qui l'a amené, un descendant d'un légendaire clan démocrate, dans l'étreinte improbable de la droite politique américaine.

Mercredi, M. Kennedy prévoit d'annoncer officiellement qu'il défie le président Biden pour la nomination démocrate à la présidence. Son scepticisme vis-à-vis des vaccins lui donne quelque chose en commun avec un autre candidat : ​​l'ancien président Donald J. Trump, qui, comme M. Kennedy, a blâmé les vaccins infantiles pour l'autisme - unthéorie discréditéecea été répudiéepar plus d'une douzaine de revues par les pairsétudes scientifiquesdansplusieurs des pays.

"Robert F. Kennedy pourrait sauter dans la primaire républicaine pour le président et seuls DeSantis et Trump, je pense, feraient mieux", a récemment déclaré Stephen K. Bannon, l'ancien stratège en chef de M. Trump, sur son podcast, faisant référence au gouverneur Ron. DeSantis de Floride. M. Bannon a déclaré que M. Kennedy avait un "suivi massif" avec son auditoire. "Les gens aiment ce gars", a-t-il déclaré.

La vaccination est un succès de santé publique singulier qui a sauvé des millions de vies. Les vaccins ont éradiqué la variole, évité des millions de décès dus à la rougeole et fait chuter les cas de polio d'origine naturelle, passant d'environ 350 000 en 1988 à six cas signalés dans le monde en 2021,selon l'Organisation mondiale de la santé.

M. Kennedy a insisté sur le fait qu'il n'était pas opposé aux vaccins et que son seul intérêt était de les rendre plus sûrs. "Je ne suis pas anti-vaccin, bien que je sois en quelque sorte l'affiche du mouvement anti-vax", a-t-il déclaré lors d'unediscours récentau Hillsdale College, un collège chrétien conservateur du Michigan.

Mais à travers son organisation à but non lucratif, Children's Health Defence, et ses films, discours et livres - dont un qui dépeint le Dr Anthony S. Fauci comme dans la poche de l'industrie pharmaceutique - M. Kennedy a utilisé sa plate-forme et le pouvoir vedette de sa famille pour semer des doutes sur la sécurité des vaccins, la diffusion de fausses informations en déformant les faits hors de leur contexte.

En 2021, le Center for Countering Digital Hate l'a nommé l'un de ses"Dizaine de désinformation"– les 12 personnes dont l'organisation a découvert qu'elles étaient responsables d'environ les trois quarts du contenu anti-vaccin sur Facebook.

Facebook et Instagram ontsupprimé les comptesof Children's Health Defence, et M. Kennedy les a accusés de censure. Il poursuit également l'administration Biden et le Dr Fauci, qui a dirigé pendant des décennies l'Institut national des allergies et des maladies infectieuses, les accusant de faire pression sur les sociétés de médias sociaux pour censurer la liberté d'expression.

M. Kennedy a refusé d'être interviewé. Dans un e-mail, il a déclaré que Children's Health Defence avait "une opération de vérification des faits extrêmement robuste". Il a également pointé unréponse de Meta, la société mère de Facebook, contestant le rapport "Disinformation Dozen". Meta a critiqué la conception de l'étude, affirmant que se concentrer sur seulement 12 personnes "manque la forêt pour les arbres".

Réaction familiale

M. Kennedy, 69 ans, est le troisième enfant aîné de Robert et Ethel Kennedy et un neveu du président John F. Kennedy, quia exhorté les Américainsà prendre le vaccin Salk contre la poliomyélite et a signé la loi de 1962 sur l'aide à la vaccination pour aider les États et les villes à mettre en œuvre des programmes de vaccination des enfants.

Son activisme, et maintenant ses aspirations politiques, ont été déchirants pour sa famille. Certains membres de sa famillel'ont publiquement réprimandé. Sa soeur Rory Kennedydit à CNNelle soutenait M. Biden, tandis que sa sœur Kerry Kennedydit dans un communiqué, "J'aime mon frère Bobby, mais je ne partage ni n'approuve ses opinions sur de nombreuses questions."

Avant sa candidature à la Maison Blanche, M. Kennedy joue sur son histoire familiale. Il vit en Californie mais prévoit de faire son annonce à Boston, une ville étroitement liée aux Kennedy. Il a récemmenta tweeté une photode lui-même dans un t-shirt vintage "Kennedy for President".

Son nom et sa réputation familiale lui ont ouvert des portes. Le Dr Fauci a déclaré qu'il avait rencontré M. Kennedy à plusieurs reprises et lui avait dit "que je crois que ses intentions ne sont pas mauvaises, mais ses informations sont incorrectes, et il est malavisé et peut causer par inadvertance un préjudice important". Le Dr Fauci a déclaré que lorsque le livre de M. Kennedy à son sujet, intitulé "Le vrai Anthony Fauci", est sorti en 2021, il a été "vraiment choqué".

"Le livre entier est un mensonge si complet", a déclaré le Dr Fauci.

Les messages de M. Kennedy ont souvent une part de vérité. Le site Web Children's Health Defence, par exemple, indique que "les vaccins contiennent de nombreux ingrédients, dont certains sont connus pour être neurotoxiques, cancérigènes et provoquer une auto-immunité". Les vaccins contiennent des conservateurs et des additifs, tels que les sels d'aluminium, qui sont utilisés dans les vaccins depuis des décennies.Des études montrenteffets indésirablessont rareset impliquent généralement des allergies cutanées.

Le site Internet Children’s Health Defence indique également que certains vaccins ne sont pas testés contre des placebos lors d’essais cliniques, citant les vaccins contre la poliomyélite, l’hépatite et la méningite comme exemples. C'est trompeur. De tout nouveaux vaccins – de la poliomyélite à la rougeole en passant par Covid-19 – sont testés dans de grands essais cliniques qui incluent des groupes placebo. Mais les scientifiques conviennent qu'il serait contraire à l'éthique de refuser les vaccins vitaux aux participants à l'étude. Pour cette raison, lorsque des vaccins plus anciens sont reformulés ou mis à jour, les études n'incluent pas de groupe placebo.

"Les blessures causées par les vaccins peuvent se produire et se produisent", déclare le site Web. C'est vrai aussi, mais le gouvernement fédéral a un système agressif pour suivre et détecter les effets secondaires afin qu'ils puissent être traités.

Le vaccin contre la rougeole, par exemple, réduit le nombre de plaquettes chez environ une personne sur 25 000 à 30 000. Cela peut provoquer des taches rouges dues à des saignements sous la peau – un problème qui est généralement "de courte durée et qui se résout d'elle-même", a déclaré le Dr Paul A. Offit, directeur du Vaccine Education Center de l'Hôpital pour enfants de Philadelphie. Mais la rougeole provoque ce problème chez un enfant sur 3 000, soit environ 10 fois plus que le vaccin, a-t-il déclaré.

"Il n'y a pas de choix sans risque, juste des choix pour prendre des risques différents", a déclaré le Dr Offit, qui a vivement critiqué M. Kennedy. "On pourrait dire que le plus grand risque des vaccins est de se rendre au bureau pour les obtenir."

Un mouvement grandit

De son propre chef, M. Kennedy a d'abord été un critique réticent de la vaccination. Il s'est impliqué en 2005, alors qu'il était avocat spécialiste de l'environnement, poursuivant des centrales électriques au charbon pour les forcer à réduire les émissions de mercure et d'autres produits chimiques toxiques.

Le mouvement anti-vaccin aux États-Unis s'était développé au milieu d'un débat sur une augmentation des cas d'autisme. En 1998, un médecin britannique du nom d'Andrew Wakefield a publié une étude sur 12 enfants dans The Lancet, une prestigieuse revue médicale, qui suggérait un lien entre le vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole et l'autisme.

Le vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole n'a jamais contenu de thimérosal, contrairement à d'autres vaccins administrés aux nourrissons. Les centres de contrôle et de prévention des maladiesdit qu'il n'y a "aucune preuve"que les faibles doses de thimérosal dans les vaccins causent des dommages, "à l'exception de réactions mineures telles que rougeur et gonflement au site d'injection".

Mais en 1999, après que le Congrès a ordonné à la Food and Drug Administration d'examiner le mercure dans tous les produits, l'American Academy of Pediatrics, les agences fédérales de santé et les fabricants de vaccins ont convenu que le thimérosaldevrais être retirédes vaccins infantiles. La décision a été prise "par prudence", a déclaré Daniel Salmon, directeur de l'Institute for Vaccine Safety de la Johns Hopkins Bloomberg School of Public Health.

Mais le déménagement a alarmé les parents. Alors que M. Kennedy parcourait le pays en prononçant des discours, a-t-il dit, les mères d'enfants handicapés mentaux ont commencé à le presser, le pressant d'enquêter sur les vaccins.

"Ils me disaient d'une manière très respectueuse mais aussi vaguement réprimande:" Si vous êtes vraiment intéressé par l'exposition des enfants au mercure, vous devez regarder les vaccins "", a-t-il déclaré au public du Hillsdale College.

En 2005, Rolling Stone et Salon ont copublié un article de M. Kennedy, intitulé "Deadly Immunity", qui accusait le thimérosal dans les vaccins d'avoir alimenté la montée de l'autisme. Salon plus tarda retiré l'article. M. Kennedy a insisté sur le fait que Salon avait cédé à la pression des régulateurs gouvernementaux et de l'industrie pharmaceutique.

Thimérosalest encore utilisédans les vaccins contre la grippe. En 2015, peu de temps après que M. Kennedy ait publié un livre sur le conservateur, il a rencontré Eric Gladen, un ingénieur qui pense avoir été rendu malade par le thimérosal dans un vaccin contre le tétanos et qui a réalisé un film sur son expérience. Les deux ont uni leurs forces. Le groupe de défense de M. Gladen, World Mercury Project, a ensuite été rebaptisé Children's Health Defence.

« Nous avions deux énormes outils pour lever des fonds ; nous avions mon film, qui représente environ 10 ans de recherche en 90 minutes, et son livre », a déclaré M. Gladen dans une interview, ajoutant:« Entre le fait qu'il soit un Kennedy, le film et son livre, il a obligé beaucoup de les gens à s'impliquer.

M. Kennedy a été un ardent opposant à la Vaccine Injury Compensation Act, une loi fédérale de 1986 visant à promouvoir le développement de vaccins en protégeant les fabricants contre les poursuites. En 2003, au plus fort de la polémique sur le thimérosal, une mesure bipartite visant à mettre à jour la loi en offrant l'immunité aux fabricants d'additifs pour vaccinseffondré au Congrès.

M. Kennedy souligne ces efforts comme preuve que les législateurs et les régulateurs fédéraux conspirent pour protéger les sociétés pharmaceutiques, qui, selon lui, manquent d'incitations à se concentrer sur la sécurité. Au cours de la lutte contre la législation californienne, il a invoqué ces arguments, a déclaré le Dr Richard Pan, un ancien sénateur de l'État qui était l'un des auteurs du projet de loi et avait rencontré M. Kennedy à l'époque.

«Il s'est principalement concentré sur la F.D.A. être corrompu et de mèche avec les sociétés pharmaceutiques pour cacher le danger des vaccins », a déclaré le Dr Pan.

Rencontre avec Trump

Peu de temps avant l'investiture de M. Trump en janvier 2017, M. Kennedyrencontré avec luià la Trump Tower de Manhattan. M. Kennedy a déclaré par la suite que le président élu souhaitait qu'il dirige une commission "sécurité des vaccins et intégrité scientifique". Ildit au magazine Scienceque M. Trump lui avait dit qu'il avait cinq amis dont les enfants en bonne santé "avaient développé une série de déficits" après avoir été vaccinés.

La commission n'a jamais abouti, mais la pandémie de coronavirus a donné à M. Kennedy une plate-forme encore plus grande. Alors que le pays devenait de plus en plus polarisé, de nombreux partisans de M. Trump évitant les vaccins et le Dr Fauci devenant un paratonnerre, le livre de M. Kennedy sur le Dr Fauci est devenu un best-seller.

Un autre livre de M. Kennedy doit sortir en juin, portant cette fois sur la controverse sur leorigines du coronavirus. Intitulé "The Wuhan Cover-Up", il affirme que les responsables fédéraux de la santé "ont conspiré avec l'armée chinoise" pour cacher les origines de la pandémie - une affirmation qui semble confondre les expériences de l'armée chinoise à l'Institut de virologie de Wuhan avec d'autres travaux financés là-bas. par le gouvernement américain.

Combien M. Kennedy parlera de la sécurité des vaccins pendant sa campagne présidentielle reste incertain. Comme il l'a fait lors du rassemblement au Lincoln Memorial, il a utilisé son discours au Hillsdale College pour dissimuler son activisme dans un point plus large - que le gouvernement, la presse et les entreprises de médias sociaux tentent de le faire taire, poussant les États-Unis vers la tyrannie.

"Les fondateurs, en particulier Hamilton, Madison, Adams, ont déclaré:" Nous avons mis la liberté d'expression dans le premier amendement parce que tous les autres amendements en dépendent "", a déclaré M. Kennedy. "Parce que si vous donnez à un gouvernement le droit de faire taire ses opposants, il a désormais une licence pour toute atrocité."